Accueil > Notes de lecture > La violence de Makhno et la critique d’Anna Saksaganskaja
La violence de Makhno et la critique d’Anna Saksaganskaja
dimanche 25 mars 2018, par
Lou Marin [1] analyse ici quelques-unes des thèses du livre :
Felix Schnell : Räume des Schreckens, Gewalt und Gruppenmilitanz in der Ukraine 1905-1933 (Espaces de la terreur. Violence et militances des groupes en Ukraine entre 1905 et 1933), Hamburger Edition/Institut für Sozialforschung, Hambourg 2012.
I. Introduction
Felix Schnell rassemble tous les matériaux accessibles dans les archives de Russie et de l’Ukraine sur l’armée de Makhno en Ukraine dans la phase de guerre civile entre 1917 et 1921.
La „sociologie de la violence“, à laquelle se rattache Felix Schnell, a pour classique l’œuvre de référence d’Elias Canetti de 1960, „Masse et puissance“. Parmi les publications importantes récentes on peut citer le livre de Randall Collins : „Violence. A micro-sociological theory“ (Princeton, 2011). Ce courant sociologique a pour but d’analyser les mécanismes de la violence s’exerçant sur la vie quotidienne des gens dans des phases, espaces ou territoires d’une extrême violence, souvent des guerres civiles, pour démontrer ce qu’on appelle aujourd’hui les conditions d’existence dans un État des „failed states“ (États en faillite).
Problèmes de ce courant sociologique : officiellement il dénonce la violence de l’État central, en même temps il n’analyse que les groupuscules violents dans une guerre civile, donc forcément, le plus souvent, l’État est présenté finalement comme une sorte de dernier refuge, nécessaire pour en finir avec la phase de terreur des violences déchaînées. De plus, les auteurs de ce courant ne sont pas du tout des non-violent/es ni des anarchistes, ils présentent la violence sociale plus ou moins comme inévitable et ils différencient seulement les degrés de violence. Ils s’appuient sur la „stabilité“ d’un régime encore violent, souvent légal, pour au moins sécuriser une vie normale pour les habitants, sans peur ni terreur qui engendrent leur violence quand ils se sentent menacés.
Cette discipline de sociologie s’avère à mon avis quand même très utile pour analyser les guerres d’aujourd’hui en Afrique et au Moyen Orient, comme en Syrie, en Irak, au Sahel, qui sont dominés par des chefs de guerre et des milices multiples plutôt que par des États.
II. Le mouvement de Makhno comme acteur dans un espace de violence
En Russie, en dehors des grandes villes comme Moscou et St. Pétersbourg, l’impact de l’État tsariste s’est réduit pendant la Grande Guerre. Puis viennent la révolution de février et le putsch des bolchéviques en octobre 1917. La violence individuelle et de groupes, excessive et endémique, s’est installée dans les périphéries dont l’Ukraine. Pour Schnell, l’armée de Makhno est un exemple de milice qui s’est créée dans les conditions d’un „failed state“.
Il y en avait en Ukraine beaucoup de formations violentes ; une faible tentative d’instaurer une république ukrainienne (Gouvernement de Rada avec un chef militaire nommé Atman) ; des interventions de militaires étrangers (Allemands, Autrichiens, Polonais) ; l’Armée Rouge des bolchéviques sous Trotski ; les Armées Blanches et bourgeoises (notamment Denikin et Wrangel, deux offensives). Il existait différents groupes ethniques de populations dans les villes et villages de l’Ukraine, souvent retirés, souvent très identitaires, avec peu de contacts, d‘échanges entre groupes voisins – ainsi des villages regroupant des allemands, juifs, ménnonites, russes, polonais, ukrainiens. Tous ces groupes et ethnies se sont armés durant cette période.
Une atmosphère d’émeute s’est installée, des uns contre des autres, avec notamment des pogromes contre les juifs.
Cette guerre civile a eu les caractéristiques d’une guerre en mouvement permanent – à l’opposé des guerres de tranchées. Donc, souvent des villages ethniques ne pouvaient pas être protégées par leurs propres milices liées à leurs populations. Ce qui constitua des conditions déterminantes, même pour les formations libertaires comme celle de Makhno.
III. Revendication de conduite (Batko) par Makhno via les actes violents
Les raisons de la reconnaissance du leadership de Makhno par son armée de paysans : d’une part il était paysan, venant de Huliaipole, d’autre part il réussit à se faire reconnaître par la détermination mise dans ces actes violents et publics.
La biographie de Makhno (1888-1934) : son père décède très tôt, lui-même intègre très jeune des groupes anarchistes de tendance armée (considéré comme terroriste, pratiquant la propagande par le fait, il commet des hold-ups armés un peu comme Bonnot) ; une première arrestation en 1906, une deuxième arrestation en 1910 à cause de dénonciations venant de Huiliaipole, condamnation au travail forcé à vie. Il fut libéré à Moscou par la révolution en février 1917.
Après son retour à Huiliapole il assure sa réputation par des assassinats de gens qui l’avaient dénoncé à l’époque : „Parmi ses premières actions figurent des actes de vengeance. (...) Il trouve dans les archives de police les noms de ses délateurs. Il traîne le premier dans la rue et lui tire une balle en pleine journée. Le deuxième, il le jette de la fenêtre de sa maison, et le troisième, un prêtre, est décapité. Puis le corps inerte fut attaché sur un cheval et promené dans les rues de la ville.“ (Schnell, p. 291)
IV. Les sources des analyses de Schnell et le témoignage d’Anna Saksaganskaja
Les actes de la milice – ou armée - de Makhno en Ukraine sont les mieux documentés de toute la guerre civile. Schnell utilise aussi comme sources principales les œuvres d’Archinov et de Voline, donc des points de vue anarchistes, qui sont d’ailleurs, notamment ceux de Voline, parfois très critiques envers Makhno en tant qu‘individu. Tandis que la plupart des anarchistes se sont appuyés sur l’autobiographie de Makhno écrite lors de son exil en France, Schnell, par contre, y critique le fait que Makhno lui-même ne parle guère des gens qu’il a tués avec ses propres armes. Schnell : „Il est bien vérifié que Makhno a tué de ses mains plusieurs centaines d‘êtres humains.“ Mais lui-même ne parle guère de ses actes de mise à mort.
Donc, Schnell utilise d‘autres témoignages : par exemple, ceux de l’épouse de Makhno, Galina A. Kuzmenko, qui a tenu un journal intime qui fut conservé par les bolchéviques. Existe également le journal intime d‘Aleksej Tchubenko, l’adjoint de Makhno à l’époque. Et puis, entre autres, on trouve un écrit autobiographique d‘Anna Saksaganskaja (1876-1939) datant de cette période dans les archives de Russie, non-publié en Union soviétique, puisque hostile aux bolchéviques : „Sous le drapeau noir“.
La vie d‘Anna Saksaganskaja : dans sa jeunesse, à St.-Pétersbourg, elle mène une vie d’artiste, proche d’un courant idéaliste, le symbolisme. Elle écrit des pièces de théâtre et des récits. Au printemps 1919, à cause de la famine en ville, elle fuit St.-Pétersbourg et s’installe chez des parents, à Jekaterinoslav en Ukraine de l’Est (aujourd’hui : Dnjepropetrovsk), qui y possèdent un immeuble de location. Après l’intrusion des soldats de Makhno dans la maison, elle s’installe dans quelques pièces avec la cuisinière de la maisonnée et ne dit rien sur sa parenté avec les propriétaires qui ne sont d’ailleurs pas dénoncés par les locataires. Parmi les soldats de Makhno, elle rencontre un chef d’une division, Fedja P., qui la protège. Fedja P. l’envoie à Voline, qui fait partie du cortège de l’armée de Makhno et qui publie le journal „Les chemins de la liberté“. Durant les deux occupations de la ville par l’armée de Makhno elle participe aux travaux de rédaction aux côtés de Voline.
V. Le massacre de Jekaterinoslav
En 1919, la ville de Jekaterinoslav change d’occupants, militaires et miliciens, à 19 (!!) reprises. Anna Saksaganskaja témoigne que les soldats de Makhno ne se comportent pas vraiment différemment des autres armées et milices.
Il y eut deux prises de pouvoir de l’armée de Makhno dans la ville. Selon Saksaganskaja (et, d‘après Schnell, selon un autre témoin, Arbatov, dans son écrit „Ekaterinoslav“), la première occupation, qui ne dura que quatre jours, fut particulièrement sanglante. Le premier jour d’invasion, l’armée de Makhno tira d’une façon arbitraire sur tout le monde, ensuite le centre commercial situé en centre-ville fut détruit et saccagé. Entouré de ses soldats, Makhno se plaçait derrière une petite pièce d’artillerie et donnait l’ordre de tirer sur les bâtiments les plus hauts du centre-ville. À la fin d’une seule journée, il y avait, selon Schnell, plus de trois cents cadavres dans les rues. Pour la plupart, les soldats de Makhno engloutirent les butins des saccages dans des fêtes alcoolisées au lieu de les donner aux paysans et au pauvres. Pourtant, sur place, Makhno bénéficiait d’une popularité au sein des paysans, puisqu’ils se sentaient libérés du joug de l’aristocratie lorsque les troupes de Makhno pouvaient les protéger, ce qui ne fut pas le cas très longtemps, car après la violence des troupes des Blancs ou des bolchéviques revenait, féroce et remplie de vengeance.
La deuxième occupation de la ville par Makhno eut une durée de six semaines. Selon Anna Saksaganskaja, la maison des locataires fut transformée en une sorte de casino pour soldats avec des fêtes alcoolisées et des prostituées qui furent prises dans la rue. Anna Saksaganskaja ne pouvait pas fuir. Quand elle tentait de s‘évader, c’est Fedja P. qui la ramenait en disant qu’elle suscitait des soupçons en se retirant. Selon Anna Saksaganskaja, elle ressentait sans cesse une angoisse mortelle. Elle témoigne de ce que, chaque jour, il y avait des exécutions au bord du fleuve Dnjepr. Les dénonciations se multipliaient : on trouvait facilement des riches, des communistes, des désapprobateurs de Makhno. Un service secret fut fondé, et chercha à se légitimer aux yeux de Makhno. Même Voline ne pouvait garantir à Anna Saksaganskaja une sécurité absolue. Elle raconte que Fedja P. voulait l‘emmener de force quand l’armée de Makhno quittait la ville et qu’elle aurait eu l’occasion de s’enfuir à la dernière minute.
Schnell parle des victimes de ces deux séjours venant de toutes les catégories sociales : les miliciens des gardes Blancs, des officiers anciens tsaristes ou des personnes qu’on accusaient de faire partie de l’une de ces troupes, souvent sans aucune preuve ; mais aussi de simples civils comme des étudiant/e/s, des commerçants ou bien des boulangers. À Tchetchelewka, pas loin de la ville, même des ouvriers d’une enclave communautaire furent attaqués.
VI. Relation concurrentielle entre chefs de milice : décision par la violence
À l’époque, dans la région de l’Ukraine de l’Est, il y avait beaucoup de milices, souvent paysannes, nommés „milices vertes“. Elles défendaient leurs récoltes contre les réquisitions par les bolchéviques ainsi que par les armées blanches. Makhno a eu des relations avec les „Verts“ des frères Antonov et de l’Atman Grigorjev. Au début de la guerre civile, Grijorjev fut un social-révolutionnaire devenu au fur et à mesure instable en changeant de côté et d‘alliance militaire à plusieurs reprises. Dans une phase de crise, quand les milices de Makhno furent réduites à 4000 hommes, Makhno tua Grigorjev en duel et en hérita les troupes de 11000 hommes, après quoi les troupes de Makhno comptèrent à nouveau 15000 hommes.
La plus grande force de l’armée de Makhno fut atteinte à la fin 1919 avec 80 000 hommes. Normalement il n‘y avait pas de femmes combattantes, mais seulement des femmes dans le train des équipages. La seule exception, en dehors de l’épouse de Makhno, fut Marusja Nikiforovna. Formée militairement au sein de l’armée de Makhno, elle devint commandante d’une division de son armée. Lorsqu‘elle exigea de Makhno une somme d’argent pour approvisionner sa division, Makhno la jeta d’un train et c’en fut fini pour elle.
VII. L’idéologie de Makhno : un primitivisme anarchiste ?
Anna Saksaganskaja s’intéressa toujours au contenu de l’anarchisme prôné par Makhno. Fedja P. lui conseillait de ne pas demander de réponses directement à Makhno puisque celui-ci n’aimait pas rentrer dans les détails. Fedja P. lui disait : „Notre anarchisme, c’est un anarchisme brigand.“ D’autres chefs de divisions de Makhno lui répondaient qu’on ne parlait pas de l’anarchisme aux paysans car c’était trop tôt historiquement et qu’ils ne comprenaient rien. Ils étaient, selon eux, plus ou moins des anarchistes naturels puisqu’ils revendiquaient leur „terre“ et une forme de „liberté“ quelconque. Les discours de Makhno devant les paysans libérés furent très brefs, et il évitait de parler de la vision d’une société anarchiste.
Par contre, Saksaganskaja témoigne d’une hostilité de Makhno envers les intellectuels. Le journal „Les chemins de la liberté“ de Voline, par exemple, „fut, dit-elle, peu lu par les militants“. Un adjoint de Makhno lui avait dit que le journal était un truc de Voline. Makhno ne s’intéressait pas à cela. De plus, il y avait bien des conseils des villages et des districts, mais l’armée de Makhno ne se sentait pas liée aux décisions des conseils.
Selon Schnell, Makhno n‘expliquait pas son anarchisme dans ses discours, mais démontrait plutôt une vision anti-villes, demandant leur dissolution et le déménagement des citadins vers la campagne après sa révolution. On n’avait pas besoin des bourgeois ni des travailleurs. Toutes et tous redeviendraient des paysans tôt ou tard. Dans cette perspective, il n’est pas surprenant que Makhno fit brûler, dans son deuxième séjour à Jekaterinoslaw, non seulement les archives de la police et des autorités publiques, mais aussi les bibliothèques de la ville.
Schnell conteste même le fait que Makhno fut anarchiste (ce que je trouve faux à cause de son long séjour en prison avec l’anarchiste convaincu Archinov). Anna Saksaganskaja considère Makhno comme „un psychopathe, tout simplement, un homme violent depuis sa jeunesse“, sans la conduite d’un père.
Schnell compare sa vision sociétale avec les visions anti-civilisatrices de courants comme Pol Pot en Cambodge ou bien de Sendero Luminoso en Pérou. Je trouve cela faux, mais on pourrait le comparer peut-être avec le courant de l’anarchisme primitiviste et anti-civilisation de Paul Zerzan aux États-Unis.
VIII. Les exécutions avec armes blanches
Les ordres oraux de Makhno se finissaient toujours par ces mots : „sinon, je te tue“. Tuer fut le signe de son pouvoir. C’est pour cela qu’il exécutait parfois ses adjoints pour excès de violence non-pratiquée ou non-approuvée par lui-même, ou bien aussi pour des actes antisémites, puisqu’il revendiquait le droit personnel de tuer directement.
Mais beaucoup de ces exécutions furent spontanées. Et Makhno ne pouvait pas contrôler cette imitation grâce à laquelle des chefs se qualifieraient eux-aussi par le pouvoir de tuer directement. Il y avait ainsi de telles pratiques par des chefs des sous-divisions de son armée qui n‘opéraient pas toujours à portée directe de Makhno.
Ces tueries directes des adjoints et officiers de Makhno le furent presque toujours au moyen d‘armes blanches. Il existe des rapports relatant que des victimes furent brûlées, des corps hachés, et que le couteau fut utilisé – au lieu d’un fusil ou d’un pistolet. Selon Schnell, l’utilisation préférentielle des armes blanches dans ces exécutions directes nécessite un contact direct avec la victime, et plus de courage qu‘avec avec un fusil, plus difficile à faire – et donc donne plus de prestige à l’exécutant, en justifiant sa prétention à une place plus haute dans l’échelle de pouvoir au sein de l’armée.
IX. La désespérance des soldats et l’impossibilité de déserter
Anna Saksaganskja raconte que, parmi les soldats de Makhno, beaucoup se désespéraient devant les contradictions entre les buts proclamés par Makhno et la triste réalité de leurs propres actes, qu’ils noyaient avec toujours plus d’alcool.
De nombreux chroniqueurs de Makhno ont insisté sur le fait que l’armée de Makhno n’avait pas besoin de recruter parmi les paysans, puisque beaucoup de fils des paysans rejoignaient volontairement l’armée. Cela se peut, mais après qu’ils aient expérimenté les pratiques brutales au sein de l’armée, il leur était impossible de déserter. Selon Schnell, des soldats désespérés furent empêchés de quitter l’armée par les autres membres du groupe. Celui qui désertait ou qui voulait s’enfuir, était fusillé. Toujours selon Schnell, le billet d’entrée dans l’armée de Makhno était gratuit, mais la seule défection prévue était la mort.
En réalité, en situation de guerre civile, il n’y avait vraiment aucune possibilité de retour. Souvent la ferme des parents avait été détruite ou brûlée par d’autres armées ou milices qui passaient après le retrait de l’armée de Makhno. Ainsi le groupe social de l’armée est devenu un système fermé sans issue. Rester dans l’armée et participer à tout ce qu’elle faisait fut presque sans alternative – et les autres soldats restaient les seuls liens sociaux. Ces mécanismes existent dans toutes les guerres civiles et reproduisent cette cohésion interne même dans la plus grande brutalité des actes.
X. L’expérience de Simone Weil en l’Espagne pour les guerres civiles en général
Citation de Simone Weil, après un séjour chez les milices internationales de la colonne Durruti, extraite de sa lettre adressée en 1938 à Georges Bernanos :
„J’ai eu le sentiment, pour moi, que lorsque les autorités temporelles et spirituelles ont mis une catégorie d’êtres humains en dehors de ceux dont la vie a un prix, il n’est rien de plus naturel à l’homme que de tuer. Quand on sait qu’il est possible de tuer sans risquer ni châtiment ni blâme, on tue ; ou du moins on entoure de sourires encourageants ceux qui tuent.“
Anna Saksaganskaja témoigne aussi, pendant des fêtes de soldats dans sa maison de location à Jekaterinoslav, de récits, par des soldats, d‘actes d’exécution, les autres soldats écoutant le sourire aux lèvres et les encourageant avec des applaudissements.
Lou Marin
[1] Lou Marin est journaliste, traducteur, chercheur et essayiste libertaire francophone d’origine allemande. Il a mis en lumière les liens étroits existants entre Albert Camus et le mouvement anarchiste. Il est l’auteur des ouvrages suivants :
– Albert Camus et les libertaires : 1948-1960, Marseille, Égrégores éditions, 2008.
– Camus et sa critique libertaire de la violence, Montpellier, Indigène éditions, 2010.
– Albert Camus. Écrits libertaires : (1948-1960), Égrégores éditions & Indigène éditions, 2013.