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Isabelle Levy
Menaces religieuses sur l’hôpital
mardi 29 mars 2011, par
Isabelle Levy : Menaces religieuses sur l’hôpital [1].
On ne saurait suspecter l’auteur d’« anticléricalisme primaire » ni de « laïcisme » pour reprendre les termes de catholiques revanchards (en témoigne l’emploi par Isabelle Levy du terme laïc » plutôt que laïque ).
Isabelle Levy est spécialiste des pratiques religieuses. Elle intervient auprès des personnels soignants en tant que formatrice.
Sa position : mieux connaître les religions – et pas seulement les trois monothéismes – pour assurer la meilleure entente possible entre soignants et patients, dans le respect de la laïcité et de la Loi de séparation des Églises et de l’État. En somme, concilier une écoute de l’autre et le maintien des principes.
Dans ce domaine, elle proteste énergiquement contre les marques ostentatoires – qu’il s’agisse du personnel comme des malades. Dans ce domaine, elle proteste énergiquement contre les marques ostentatoires – qu’il s’agisse du personnel comme des malades. Également remises en cause, les clauses de conscience souvent préjudiciables aux femmes. Ou encore le fait d’écouter le conjoint ou la famille plus que le malade lui-même, etc…
De très nombreux exemples viennent à l’appui de ses dires. Il y a surenchère de demandes religieuses à l’hôpital, qui peuvent mettre en danger la santé, la vie même des patients, qui contreviennent aux règles les plus élémentaires de la sécurité et de l’hygiène, et qui monopolisent des personnels déjà surchargés. Les soignants ne sont pas épargnés par ce réquisitoire, certains laissant faire, d’autres arguant pour eux-mêmes de raisons religieuses pour ne pas assurer certains soins.
Il existe en outre des disparités d’accueil entre les différentes confessions, la catholique étant la mieux traitée, sans doute par tradition : mieux connue de la plupart des soignants, et suite à la place des personnels religieux dans les hôpitaux jusqu’à il y a peu.
Néanmoins, on peut s’étonner d’une contradiction : certes il est compréhensible que les malades et les mourants, ne pouvant se déplacer, voient venir à eux s’ils le demandent, des représentants de leur confession. Que ces derniers disposent d’un local, pourquoi pas. Mais qu’ils soient salariés par l’établissement hospitalier, comme c’est toujours le cas ? En dehors du statut concordataire de l’Alsace-Lorraine, déjà totalement contestable, voilà qui contrevient à l’un des articles de la Loi de 1905 : « La République ne reconnaît ni ne salarie aucun culte ».
On objectera que les exceptions sont de plus en plus nombreuses : subventions et contrats avec les établissement privés d’hospitalisation ou d’enseignement, sans compter les professions de foi ouvertement chrétiennes du président de la République. Quant aux infractions, elles sont de plus en plus souvent tolérées, par crainte de paraître intolérants, ou pour éviter des affrontements voire des violences difficiles à gérer en milieu hospitalier.
Le livre est donc intéressant, et permet de mesurer l’aggravation du poids des religions et des communautarismes, puisque venant d’une personne a priori favorable au dialogue et à l’écoute des croyants de tous bords, comme des athées et agnostiques.
SKS
[1] Isabelle Levy : Menaces religieuses sur l’hôpital, Presses de la Renaissance, février 2011