« La raison pour laquelle je m’oppose définitivement à l’énergie nucléaire est si évidente pour moi que je demeure stupéfait que la planète entière n’y soit pas pareillement opposée : les déchets nucléaires dangereusement radioactifs doivent être stockés et surveillés pendant des périodes excédant de manière délirante tout cadre de référence de la civilisation. Serait-il possible de rendre inoffensives ces barres de combustible épuisé, disons en cinq ans, même alors je m’inquiéterais de l’insouciance et de la cupidité, mais au moins je serais prêt à admettre que l’énergie nucléaire puisse être utile. » (p.30)
« Car ceci est un récit de choses que nous pouvons à peine croire, et encore moins comprendre. » (p. 73)
L’écrivain William T. Vollmann, fidèle à ses habitudes d’investigation, s’est rendu à Fukushima dans les jours qui ont suivi le séisme, le tsunami puis la catastrophe dans la première des centrales.
Il en résulte un livre-reportage court, quatre-vingt six pages, mais d’une force remarquable.
Avant de partir, William T. Vollmann a fait l’acquisition d’un dosimètre, destiné à mesurer la radioactivité ambiante. Il raconte, avec des mots simples, sans aucun sensationnalisme et parfois avec humour, ses rencontres avec la population dans ces zones « contaminées » selon les termes en usage, pour ne pas les qualifier d’irradiées. Il sait faire surgir des images : les gravats, les cendres, les décombres, un tableau digne des destructions dues aux guerres les plus terribles, une vie quotidienne presque surréaliste, et l’extraordinaire courtoisie d’habitants qui ne possèdent plus rien, sauf la vie, le journaliste-écrivain s’étant volontairement abstenu d’interroger ceux qui avaient perdu des proches. Et encore, avec la présence muette de ce mal invisible, cette vie est menacée dans un avenir plus ou moins proche.
William T. Vollmann, Fukushima – dans la zone interdite – voyage à travers l’enfer et les hautes eaux dans le Japon de l’après-séisme, traduit de l’anglais (États-Unis) par Jean-Paul Mourlon, Editions Tristram, Suhrkamp (Allemagne), 2011 (2012 pour la traduction française).
SKS